Une collaboration entre l’équipe menée par le Dr Olivier Tenaillon et une équipe de Harvard a permis une récente publication dans la revue Science. Ce travail a été initié à l’unité IAME U1137 de l’Inserm et finalisé à l’Institut Cochin, UMR 1016. Les cotutelles de longue date sont l’Université Sorbonne Paris Nord, Université Paris Cité.
Cette étude avait pour but d‘étudier l’adaptation des microorganismes à leurs environnements. Il est important de comprendre cette capacité d’adaptation des bactéries et virus en termes de santé publique, car elle est directement impliquée dans des phénomènes tels que la résistance aux antibiotiques ou la propagation de variants du SarsCov2. Comme tous les organismes métaboliquement actifs, les bactéries stockent leurs informations génétiques dans leur ADN. Les mutations, en modifiant cet ADN, peuvent rendre ces bactéries plus faibles, mais peuvent aussi augmenter leur capacité reproductive ce qui correspond à de l’adaptation. Ce processus adaptatif est ainsi fortement dépendant de l’effet des mutations qui peuvent se produire. Mais la question est de savoir si la connaissance de ces effets permet de prédire à l’avance comment l’adaptation va se produire ? Cette question est essentielle concernant bien sûr l’évolution des microorganismes pathogènes, mais de façon plus large estimer la réponse au changement climatique des organismes qui nous entourent est un des défis majeurs des décennies à venir.
Pour adresser cette question, les chercheurs ont eu recours à une expérience d’évolution au laboratoire initiée en 1988 au cours de laquelle 12 populations bactériennes ont évolué pendant plus de 70,000 générations. En mesurant précisément l’effets de milliers de mutations possible à différent stades de cette adaptation, ils ont pu montrer qu’il était possible de prédire relativement bien ce qui allait se produire au cours des premières phases de l’adaptation, puis que le pouvoir prédictif diminuait. Ces résultats sont très encourageants car c’est au cours de ces premières phases de l’adaptation que les bactéries s’adaptent le plus, les phases tardives représentant des ajustements mineurs.
Ainsi ces travaux démontrent qu’une approche évolutive comme celle déployée ici doit faire partie de la palette des stratégies à utiliser dans la prévention des maladies infectieuses. La connaissance du potentiel évolutifs de pathogènes émergents, pourrait par exemple permettre de mieux calibrer les risques associés à leur propagation et d’affiner en conséquence les stratégies sanitaires et thérapeutiques à utiliser.